Introduire plus de diversité, se montrer plus inclusif. Là où certains y voient une tendance, d’autres militent pour en faire une norme. Entre les deux, un changement de taille, qui s’opère probablement étape par étape. Car en creusant un peu le concept, il ressort une ligne évidente : le marketing inclusif est, avant tout, une histoire de valeurs, de convictions, d’engagement, de confiance. Ainsi, l’objectif, bien qu’il fasse vendre davantage comme le montrent les chiffres, serait , en priorité, de trouver le moyen d’inclure l’Autre, dans toute son entièreté, dans nos schémas de pensées. Un chemin, peuplé d’escales, pour parvenir à réinventer, sur la base du réel, une discipline, qui historiquement se nourrit de clichés et de préjugés. Parce qu’il faut bien débuter quelque part, quelques conseils pratico-pratiques, afin d’aider ce fameux Autre à se sentir chez toi, un peu plus chez lui.

C’est quoi le marketing inclusif ?

Difficile de donner à ce terme une définition précise, tant il relève plus de l’intention que de la technique marketing. Ainsi, dans un monde en mouvement, le marketing inclusif consiste davantage à changer de paradigme qu’à appliquer des recettes toutes faites. Évidence pour les uns, opportunité pour les autres, le concept repose sur deux pieds : percevoir l’étendue de la diversité, l’intégrer à l’ensemble de la chaîne de valeurs. A la clé, un bénéfice, double lui aussi, puisque l’entreprise qui s’y prête gagne en considération et en audience. Et donc, en croissance.

Ainsi, la première étape de ce processus serait donc d’ouvrir les yeux des marketers afin de leur rappeler que non, tous les personae, ne sont pas que le sombre reflet de nous-mêmes et notre petit microcosme. Se souvenir, découvrir peut-être, que d’autres humains, avec d’autres histoires, ont aussi leurs places dans le jeu. Mieux, que bon nombre d’entre eux y jouent déjà, sans jamais que l’on ne les voit. Bam, nous voilà en pleine exploration de la diversité. Le quoi de notre problématique.

Un quoi, qui entend considérer l’Autre sous toutes les coutures. Son âge, ses origines, sa culture, son identité de genre, ses orientations sexuelles, ses croyances, sa langue, sa situation socio-économique ou sa localisation. Mais aussi, une segmentation plus subtile encore, plus sociologique peut-être incluant des critères comme son rapport au corps, son état d’esprit, ses valeurs d’appartenance, son attachement à la famille, sa perception de l’amour ainsi que son intersectionnalité. Une notion clé, qui induit qu’une seule et même personne peut multiplier les identités et de se définir par une vaste palette de nuances.

Source : Microsoft

Une fois doté de cette vue panoramique, le marketeur réinventé peut s’attaquer au comment : l’inclusion. Objectif : promouvoir la marque, par le biais de messages, capables de résonner auprès de ce public diversifié, en lui racontant la bonne histoire ; celle par laquelle il se sent concerné, permet de s’identifier, de se reconnaître au travers des valeurs portées. Un exercice tout en subtilité, visant pour les uns à briser les stéréotypes, pour les autres à simplement refléter la réalité des « vrais gens ».

Dans les deux cas, une aubaine pour se connecter à un nouveau public, celui des ignorés.

Et accessoirement, de donner un autre visage au marketing. Une réflexion qui, si elle incarne une dimension éthique, ne s’y limite pas, puisque les résultats sont là. En portant une attention plus grande à la réalité pragmatique de ses clients, la marque entend se démarquer auprès d’une nouvelle audience, tout en fidélisant sa base. Et ça marche !

Le marketing inclusif :

  • Augmente la considération : 54% de la génération Y déclarent privilégier une marque inclusive à son concurrent, à produit égal. Microsoft.
  • Incite à l’achat : 69% des consommateurs noirs disent qu'ils sont plus susceptibles d'acheter auprès d'une marque dont la publicité reflète positivement leur appartenance ethnique ; 64% des utilisateurs sont passés à l’action après s’être identifiés face à une publicité inclusive. Google
  • Améliore la perception de la marque : 86% des consommateurs estiment que les marques doivent se positionner socialement ; 63 % des individus interrogés estiment que les marques dont les publicités reflètent la diversité de la population sont plus authentiques et dignes de confiance. Microsoft.

Marketing inclusif, une réflexion de fond

En somme, le marketing inclusif consiste à examiner la perception de la marque, au travers de ce que pourquoi les gens l’apprécient, réaligner les intérêts des clients et la mission de l’entreprise, nourrir la conversation en acceptant d’explorer de nouvelles perspectives. Seulement, pour passer d’un monde illustré par Istock au reflet du monde d’en bas, il y a clairement un pas à faire. Un pas de géant pour certaines marques.

D’autant que ce positionnement marketing, à l’instar du marketing durable, dépasse largement l’écosystème de promotion. Avant même de dérouler la technique, le tout repose sur un travail de fond.

Identifier les terrains d’exclusion

Qui dit inclusion, dit exclusion. Ainsi, mission première de cette mutation du genre, cerner ce qui dans ton marketing, ou plus largement ton produit, relève de l’exclusion, plus ou moins consciente. Pour cela, tu devras comprendre ta cible dans la cible, ceux qui font partie de tes clients, mais pas de tes personae. Ceux que tu pourras inclure à cette communication d’une nouvelle ère.

Évidemment, appréhender les ressorts culturels de l’adolescent non binaire ne te sera d’aucune utilité si tu vends des pneus. Puisque privé d’un permis de conduire, il.elle est hors cible. En revanche, tu pourrais t’apercevoir que la mère de famille monoparentale semi-urbaine est une bonne cible, capable d’acheter et changer son pneu sans renfort masculin.

Élargir son horizon

Toutes les entreprises s’essayant au marketing inclusif débouchent sur le même constat : c’est d’abord au sein de l’équipe projet que se joue l’inclusion. En ouvrant la porte à des profils plus atypiques, venus d’horizons divers, il est nettement plus simple de réduire la distance culturelle entre le marché et ceux qui tentent de le conquérir.

C’est aussi l’opportunité d’explorer d’autres perceptions, usages, ressentis. Et, par rebond, faire évoluer le produit, comme son marketing. Un effort minime pour un enrichissement maximal, puisque selon une étude Deloitte, une entreprise dite inclusive est 6 fois plus susceptible d’être agile et innovante ; 8 fois plus susceptible de vendre davantage, 2 fois plus susceptible de dépasser ses objectifs financiers.

Doser avec parcimonie

Dernière étape, et pas des moindres, placer le curseur au bon endroit. En effet, s’il s’agit de s’interroger en 3 dimensions pour évaluer si ce que ce que tu vends est inclusif par nature, si l’audience visée l’est aussi, tout comme la façon de le commercialiser, il faut rester vigilant à ne pas trop en faire. Pire, verser dans les stéréotypes inversés, qui sonneraient doublement faux.

Pour être convaincante, l’approche inclusive invite, avant tout, à la sincérité et l’authenticité. La marque doit, non seulement, défendre des valeurs auxquelles elle croit mais les mettre en application de bout en bout de l’expérience client. A défaut, l’adhésion n’y sera pas.

Accusées de woke-washing, les marques qui tentent de se refaire une image en décalant le cliché d’un cran sont vite repérées et s’exposent à un contre-résultat. Autre écueil à éviter, l’appropriation culturelle, qui là aussi, peut avoir un effet ravageur sur l’image de marque.

Pour sonner juste, le marketing inclusif doit se jouer sur l’ensemble de la chaîne, de la rédaction du brief produit à l’émergence de nouveaux KPI. Google a, par exemple, introduit un indicateur destiné à évaluer la part laissée aux femmes dans ses publicités. Résultat, seulement 37% des pub les évoquent. Pire, 85% d’entre elles estiment ne pas se reconnaître dans cette représentation de la femme.

Preuve que même avec de bonnes intentions, l’inclusif faux pas n’est pas loin !

Marketing inclusif, travaux pratiques

À ce stade, tu te dis sûrement que c’est bien toute cette théorie, mais concrètement, on fait quoi ?! Et bien, en la matière, pas de réponse toute faite, puisque l’orientation à donner est directement liée aux valeurs de la marque ainsi qu’à tes convictions personnelles. La bonne question à se poser est sans doute de chercher comment - par le produit, son usage et son image - rendre la marque accessible au plus grand nombre, sans dénaturer ce qu’elle est.

De cette réflexion de fond, naîtront naturellement les ajustements à faire pour avancer vers plus de diversité et d’inclusion. Parmi, des quasi incontournables…

Faire évoluer la représentation visuelle de la marque

Cliché dans le cliché, le marketing inclusif se veut plus proche du body positive que de la mannequin 80’ parfaitement photoshoppée ; tous les entrepreneurs ne chevauchent pas des licornes du haut de leurs 24,5 ans ; les parisiens aussi mangent du boudin ; les lesbiennes ne sont pas nécessairement tatouées sous leur débardeur ; les plus de 65 ans aussi se lavent les dents… Bref, tu me suis. On décapite les banques d’images pour se réinventer une imagerie propre à la marque, dans laquelle chacun peut piocher un peu de soi.

Trouver le mot juste

Dans la même veine, c’est sans doute l’occasion de mettre à jour ton brandbook pour faire évoluer le discours vers un maximum de congruence. Privilégier une sémantique à une autre, exclure certains mots connotés, poser noir sur blanc tes valeurs, tes mojo. Par nature, le sujet invite à s’interroger sur l’adoption – ou non – de l’écriture inclusive. Un débat qui mérite son article tant la balance n’est pas évidente. Car oui, elle permet de gommer certains préjugés, mais elle est aussi, très infidèle aux règles de la langue, ce qui altère drastiquement la lisibilité et rend les contenus moins accessibles. Or…

Offrir un design plus accessible

… est une priorité, qu’il s’agisse du produit ou de ses supports de promotion. Coté digital, les lignes sont tracées grâce aux standards tels que le WCAG ou le W3C. L’extension Chrome Accessibilité permet d’établir un bilan et d’obtenir des recommandations en la matière. Ce peut être des choses très simples, mais foncièrement utiles aux utilisateurs atteints d’une déficience, comme l’ajout de balises alt sur chaque image, permettant d’en décrypter le contenu ou l’ajustement des couleurs à l’aide d’un simulateur de daltonisme. L’ajout des sous-titres aux vidéos, indispensables pour les réseaux sociaux, est d’ailleurs né de cette dynamique. Tout comme les tablettes, qui avant d’être l’accessoire préféré des geeks de salon, ont été pensées pour faciliter l’accès à internet aux personnes à mobilité réduite.

Comme quoi, en cherchant à faire mieux pour les uns, l’on peut tout simplement faire bien pour tous.

Finalement, un marketing inclusif est un marketing du vivant. Avec ses couleurs, ses joies, ses peines et ses craquages consuméristes. Un beau défi !